En chemin

31/03/2020

Foi et espérance fermes en Dieu, car il vous aidera en toute chose

Un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas (Lao Tzu)

Mes chères sœurs
Ce sont des temps sans précédent, vraiment ! Dans le contexte de la pandémie mondiale de Covid-19, nous nous rendons compte, de façon inattendue, de notre réalité en tant que communauté globale avançant vers une Vie Nouvelle. La propagation de ce virus est certainement globale, avec des statistiques alarmantes. Ses victimes sont de toute nation, de toute race et de toute croyance. Le virus lui-même ne tient compte ni de la classe sociale, ni du genre, ni de la conviction politique. Ce sont les jeunes qui semblent les plus capables de résister à son impact. Comme dans beaucoup de situations, ce seront les pauvres qui seront les plus durement touchés. De nombreuses personnes qui n’ont pas contracté la maladie ont été contaminées par l’anxiété, et peut-être même par un sentiment de panique.   
L’expérience du « confinement » devenue réalité dans presque tous nos pays, est une expérience particulière de Carême. Bien que cela puisse restreindre nos mouvements et limiter notre liberté de choix, nous sommes conscients que c’est une décision prise pour le bien de tous - une restriction des choix personnels pour le bien commun. Les pratiques de Carême de prière, de jeûne et d’aumône sont étroitement liées à la façon dont nous sommes encouragés à vivre pendant ces jours.

  • Nous prions, nous portons dans nos cœurs les besoins de notre monde et les présentons à notre Dieu
  • Nous jeûnons, nous limitons nos choix, nous nous restreignons, non pas pour notre propre bénéfice, mais pour le bien des autres
  • Nous faisons l’aumône, en prenant généreusement sur notre sécurité personnelle et notre propre richesse, pour partager avec ceux qui n’ont pas assez.

Ces jours-ci, nous avons vu ces pratiques, que nous associons à la période de Carême, vécues autour de nous comme une réponse aux besoins humains. Nous sommes conscientes des actions généreuses des médecins, des infirmières et d’autres travailleurs de la santé qui se mettent en danger afin de prodiguer des soins vitaux aux malades. Chacune de nous aura ses propres histoires de bonté et de créativité, de courage et de générosité, des histoires qui, au fur et à mesure que nous les partageons, offrent espoir et encouragement.
Beaucoup d’entre nous ont eu l’occasion, le vendredi 27 mars, de regarder la diffusion en direct du Pape François offrant la bénédiction spéciale « Urbi et Orbi » depuis une place Saint-Pierre vide. Sans doute serez-vous d’accord pour dire que ce fut un moment profondément émouvant de voir cet homme seul, vêtu de blanc, marchant en boitant à travers une Piazza vide, puis, debout, seul, pour prier en notre nom. Ses limites physiques étaient à nouveau visibles alors qu’il élevait le Saint Sacrement pour la bénédiction sur la place vide. Ses paroles étaient à la fois stimulantes et consolantes : « Nous avons réalisé que nous sommes tous sur le même bateau, tous fragiles et désorientés, mais en même temps, tous importants et nécessaires, nous sommes tous appelés à ramer ensemble, chacun de nous ayant besoin de réconforter l’autre. » Et plus tard, « Embrasser le Seigneur afin d’embrasser l’espérance : c’est la force de la foi, qui nous libère de la peur et nous donne l’espoir. »
L’histoire nous montre que les pandémies finissent par prendre fin, et celle-ci prendra également fin, même si nous devons être patients. Je me demande, cependant, comment nos modes de vie pourraient être modifiés au lendemain de ces mois, comment ce moment difficile nous mènera à de nouvelles façons d’être et d’interagir. Je me demande comment nous allons aider à créer, et à accepter une « nouvelle norme ». Allons-nous prendre conscience des autres, être plus compatissants, plus sensibles aux besoins de nos voisins ? Ou succomberons-nous à la pression d’être davantage repliés sur nous-mêmes ? Cette expérience d’isolement forcé deviendra-t-elle une habitude, ou nous mettra-t-elle au défi de développer des moyens créatifs et vivifiants pour répandre la compassion et l’intérêt généreux, et pour bâtir la communauté et la solidarité. Dans la « nouvelle norme », quelle que soit la forme qu’elle prendra, notre espérance sera-t-elle plus profonde, notre foi en un Dieu qui donne la vie sera-t-elle plus forte ?
Ces jours-ci m’ont également rappelé l’un des appels forts, que Dieu nous a adressés pendant le Chapitre Général ... pour embrasser notre vulnérabilité. Nous sommes toutes confrontées à notre manque de maîtrise, à la vulnérabilité de nos services de santé, de nos systèmes économiques, et de nos structures sociales. Comme François nous l’a rappelé, cette expérience « expose notre vulnérabilité et révèle les certitudes fausses et superflues autour desquelles nous avons construit nos horaires quotidiens, nos projets, nos habitudes et nos priorités ». Alors entrons ensemble dans cette expérience de vulnérabilité, et soyons ouvertes à une conscience renouvelée des grâces, de la bonté et de la force que nous partageons et que nous avons peut-être considérées comme acquises. 
En tant que chrétiens, nous entrons dans l’expérience annuelle du Carême, en regardant vers Pâques. Nous ne pouvons pas revivre les événements de la Semaine Sainte sans nous rappeler que la Résurrection en est le terme. Notre foi nous dit que la vie prévaut et que, aussi difficile et douloureuse qu’elle soit toujours, la mort n’aura jamais le dernier mot. Nous portons donc aussi cette même espérance en ces jours d’anxiété et d’isolement. Oui, l’anxiété est très réelle, car nous partageons le sentiment d’être submergés par une situation qui échappe à notre contrôle. Cependant, c’est dans ce monde que Dieu est présent, c’est dans ce monde de souffrance que Dieu s’incarne, c’est dans cette situation douloureuse que le tombeau s’ouvre le matin du dimanche de Pâques. Peut-être cette espérance est-elle le témoignage particulier que nous sommes appelées à donner dans notre monde vulnérable en ce moment.

Nul doute que, où que nous soyons dans le monde, nos célébrations de la Semaine Sainte et de Pâques prendront une forme différente cette année. Les célébrations liturgiques avec nos communautés ecclésiales plus larges ne seront pas possibles dans l’ensemble. Cela ne limitera cependant pas la réalité de la Résurrection. Nous sommes toujours le peuple de Pâques et l’Alléluia sera toujours notre chant !
Soutenons-nous les unes les autres dans la prière et l’amour, unies dans notre Foi que la vie nouvelle est toujours possible, et dans nos efforts pour être des témoins de l’Espérance. Rappelons-nous qu’Angèle nous a exhortées à avoir « foi et espérance fermes en Dieu, car il vous aidera en toute chose ». (Prologue des Avis)


Sue Flood osu