En chemin

07/07/2020

Un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas (Lao Tzu)


De temps en temps, je me tiens sur la terrasse du Généralat et je regarde le soleil se coucher. Je l’ai fait récemment, le soir du solstice d’été, le 20 juin, alors que le coucher du soleil a duré près de 40 minutes. C’était comme si le soleil ne voulait pas disparaître cette nuit-là! Comme je me laissais absorber par la beauté des couleurs subtilement changeantes, je savais que de l’autre côté du globe, ce même soleil se lèverait bientôt à la mi-hiver en Australie. J’étais également consciente du fait qu’un grand nombre d’entre vous commençaient ou terminaient la  journée… ou en étaient peut-être au beau milieu de celle-ci… partout sur la planète. Nous sommes en effet une Communauté Globale, et, dans nos expériences diverses, nous avons tant en commun.
Il y a de nombreuses occasions, comme à ce moment-là pour moi, où notre perception de la nature, de sa beauté et de ses luttes, nous rappellent notre expérience collective. Actuellement, un des aspects de notre expérience commune est la pandémie de Covid-19. Pour certaines, le pire de la contagion semble s’éloigner. Ailleurs, nos sœurs font face à la propagation rapide de la maladie et font de leur mieux pour gérer son impact pour elles-mêmes, leurs communautés, leurs familles, leurs collègues et leurs projets apostoliques. Pour nous toutes, l’incertitude demeure : nous nous demandons quand les déplacements, la libre circulation et les rassemblements seront possibles, quand et si un contact personnel plus étroit avec les amis et les proches se fera plus naturellement, quand notre engagement dans les communautés paroissiales et scolaires redeviendra plus aisé. Au-delà des impacts personnels et communautaires, qui font maintenant partie de notre  quotidien, les implications sociales, économiques et écologiques de la pandémie seront durables.
Nous continuons à nous demander – quelle Parole Dieu nous adresse-t-il dans et à travers cette expérience ?  Quelle grâce nous est-elle offerte ? Comment lire « les signes des temps » auxquels nous sommes confrontées ? Comment ces jours-ci nous appellent-ils à une transformation personnelle et communautaire ?
Dans son livre Deep Incarnation, le théologien australien Denis Edwards explore ce concept théologique expliqué comme “une incarnation dans le tissu même de l’existence biologique et du système de la nature”. Il se réfère et s’appuie sur les paroles du Pape François dans Laudato Si :
 ‘Dans des expressions belles et profondément significatives, le Pape François dit qu’il y a des moments où le monde naturel peut être expérimenté comme la caresse de Dieu, et comme des paroles d’amour pour nous. La Deep Incarnation ajoute qu’il y a aussi des aspects du monde naturel qui impliquent des pertes terribles et de grandes souffrances. Elle insiste, cependant, sur le fait que même dans les événements terrifiants, Dieu est présent dans l’amour comme un compagnon fidèle et aimant dans notre souffrance de créature  et comme une promesse de vie.  Peut-être l’intuition la plus importante de la Deep incarnation est-elle que la Croix de Jésus, le Verbe fait chair, est l’icône, ou le sacrement, de la co-souffrance rédemptrice de Dieu avec les créatures qui endurent des horreurs, et la promesse de leur participation à la guérison et à la transfiguration de la vie de la résurrection.’ Deep Incarnation  Denis Edwards, Orbis Books 2019  p. 131
Si nous croyons vraiment en l’Incarnation, alors nous devons croire que Dieu est présent en ce moment du temps, ce moment d’incertitude et de vulnérabilité. En faisant l’expérience plus concrète de notre vulnérabilité personnelle, communautaire et sociale, une vulnérabilité que nous avons en commun les uns avec les autres et avec tout le monde créé, nous croyons que Dieu est présent. Grâce à cette expérience de vulnérabilité, nous sommes invitées à prendre au sérieux l’intention du Chapitre Général 2019 qui nous appelle à nous engager dans la réconciliation, le renouvellement et la régénération, personnellement et collectivement, et aussi dans le cadre de l’écosystème plus large, notre « maison commune ». Peut-être alors découvrirons-nous quelque chose de la grâce de ce moment? Peut-être serons-nous alors prêtes à être surprises par de nouvelles perspectives avec lesquelles nous pouvons avancer ensemble dans le monde d’après la pandémie? Ne serait-ce pas merveilleux si, en tant que communauté globale de femmes, nous pouvions offrir ensemble ce don de guérison et de transformation à nos communautés plus larges ? Ce serait sûrement un don de vie nouvelle pour notre monde !
Continuons à être encouragées par Angèle, qui nous rappelle de « persévérer joyeusement et fidèlement dans le travail commencé, et de prendre soin, dis-je, de ne pas perdre cœur » (Dernier Legs). Et comme toujours, nous avons confiance dans les paroles de Jésus, “Je suis venu pour que vous ayez la vie, la vie en plénitude” (Jn 10, 10).
Alors que nous sommes immergées dans la beauté de la nature et dans la lutte de notre monde, souvenons-nous les unes des autres, en ces jours, en nous portant les unes les autres dans la prière, dans la réciprocité et la relation à notre Dieu qui est Créateur aimant, Verbe fait chair et Esprit consolateur.

 

Réponses généreuses
Chacune d’entre nous réagit du mieux qu’elle peut, et toujours avec générosité, à l’impact de la pandémie sur ceux qui nous entourent. Certaines sœurs fournissent et distribuent régulièrement des colis alimentaires aux familles vivant dans des villages et des établissements pauvres. Certaines sœurs font du bénévolat dans les hôpitaux et les cliniques afin que du personnel médical plus qualifié soit disponible pour soigner ceux qui ont contracté la maladie. Il y en a beaucoup qui cousent des masques pour les distribuer. Dans les régions du monde où l’accès à Internet est très limité ou inexistant, les sœurs font de grands efforts pour maintenir des liens avec les élèves et leurs familles et pour continuer à fournir des ressources pour soutenir les enfants dans leur apprentissage. Bon nombre d’entre nous offrent soutien et encouragement en visitant des personnes âgées confinées à la maison, des membres de communautés paroissiales et des voisins ou en établissant des liens par d’autres moyens. Nous faisons toutes attention à notre propre protection personnelle afin de ne pas courir le risque de contracter ou de transmettre l’infection. Nous pouvons être reconnaissantes pour tant de générosité, et aussi pour les ressources - personnelles, physiques et financières-, qui nous permettent de répondre de cette façon.

À celles pour qui le début de juillet signifie l’arrivée de l’été et des vacances, je souhaite une période de repos. À celles pour qui cette période de l’année apporte les jours plus courts et plus sombres de l’hiver, je souhaite chaleur et abri. Et, au nom de tous les membres du Conseil Général, j’envoie à chacune des bénédictions pour sa santé, sa force, son courage et son espérance inébranlable.

Avec mon affection, et la promesse de ma prière,

Sue Flood osu


Le Conseil Général à l’occasion du Jubilé d’argent de Sr Nurhayati Wiguno, le 13 mai 2020

Fruits mûrs sur l'abricotier planté à la fin du Chapitre général