Le coin de la réflexion

26/05/2021

Solennité de la Très Sainte Trinité

Le mystère de Dieu dans la Sainte Trinité dépasse notre capacité à comprendre. Dieu dans sa grandeur et son mystère est en même temps celui qui est infiniment proche de nous dans l'amour. Sainte Marie de l'Incarnation, une Ursuline, mystique et missionnaire, en parle dans une lettre adressée à son directeur spirituel.

Lettre 2 - Sainte Marie de l'Incarnation

De Tours, à Dom Raymond de S. Bernard, Feuillant, fin 1626 (?)

Vision de la Trinité ; la captivité mutuelle d’amour et les privautés de l’âme aimante.

Sur l’attrait de la vue des trois Personnes divines, mon esprit se trouva occupé d’une manière que je ne puis exprimer tant elle fut prompte et subite. En un instant je compris beaucoup, et cette vue fut pour moi toute d’amour, mon âme se tenant collée bien fortement à son objet, sans pourtant se servir de son propre agir, car elle ne pouvait rien que pâtir ce que voulait l’objet qui la tenait par fois dans l’admiration et dans l’adoration. Mais l’amour qui n’est jamais en repos et qui ne peut durer en lui-même, charmait mon âme d’une telle manière qu’elle oubliait, s’il faut ainsi parler, la Majesté quant au respect, mais non quant à la vue : Je veux dire qu’étant embrasée d’amour, elle ne pouvait voir qu’amour. Sa vue s’arrêtait à la personne du Verbe, qui était l’objet de sa passion et qui ravissait et captivait son cœur par un si doux charme, que je ne puis trouver de paroles pour l’exprimer. Elle était captive de l’amour, mais aussi l’amour (c’est-à-dire l’Epoux) était son captif par un mutuel retour d’union et d’embrassement. Lui seul sait les entretiens de celle qui le tenait ainsi embrassé et qui recevait aussi de lui la bienveillance de son amour dans un si doux commerce.

… Je faisais quelque réflexion sur cette grande privauté et je sentais quelque inclination à me retirer dans le respect, mais au lieu de cesser, elle augmentait encore et je m’écriais : « O mon divin Amour, c’est vous-même qui êtes la cause de ce que je suis si hardie avec vous. Je vous reconnais pour mon grand Dieu, mais aussi vous êtes mon grand Amour, et vous vous montrez à mon âme d’une façon si charmante qu’il faut que l’amour l’emporte sur le respect que je vous dois, et il m’est impossible de faire autrement, parce que vous m’emportez et je vous veux obéir ; cela est raisonnable parce que vous êtes Amour ».

  • Note: V 115 introduit ainsi cette lettre : « C’est ce que remarque notre Mère dans un écrit, où elle rend compte à son Directeur de cette disposition intérieure… » ; V la donne en éclaircissement de R 1624 ; le fragment pourrait donc dater de la fin de 1626 ou du début de 1627 ; peut-être ce fragment est-il tiré du même écrit que la première lettre à son Directeur.